Une figure du peloton
Pol Roland ... Un phénomène
Mon vieux Pol (ou Paul ?), ce n'est pas te faire injure que de rappeler que tu es né en 1923 et que tu portes allègrement tes 73 printemps.
Tu es l'aîné du peloton et il faut bien l'avouer, ça ne se remarque pas. Beaucoup se disent: "Je voudrais être comme cela
à son âge".
Mais quel est son secret ? Lorsque je lui ai posé la question, il m'a simplement répondu: "Je ne fais pas d'excès, je
pratique la gymnastique quotidiennement et je prends une douche froide chaque jour, été comme hiver" ... Evidemment, l'hiver,
ça doit réveiller ses vieilles cellules.
Pol est entré au C.C.P.L. en 1979 et à cette époque, il nous a souvent mis les nerfs en boule par sa grande distraction.
Toujours le dernier au rendez-vous, il oubliait régulièrement une pièce de son équipement ou de son matériel, même
qu'un jour il s'est amené sans chaussures. Ce sont ces situations répétées qui, à l'époque, m'avaient
inspiré ce dessin.
Et bien, Pol, n'as-tu rien oublié ?
Evidemment, la première année du passage à l'heure d'été, il a manqué le rendez-vous.
Parfois, son insouciance a atteint des degrés insoupçonnés. Un de ses collègues à la gendarmerie m'a conté
l'anecdote suivante:
Lors d'une patrouille, en circulant dans un petit village aux ruelles étroites, Pol est passé entre deux charretées de foin qui se
croisaient. Le passage était tellement exigu que son collègue s'est arrêté. Au retour à la caserne, devant les
remontrances de son coéquipier toujours sous le coup de la frayeur, Pol n'a manifesté que de l'étonnement, il ne se souvenait pas
d'avoir vu les deux charretées. Je vous le dit: un vrai phénomène !
Une autre, une autre ... En 1984, lors de notre séjour dans les Vosges, nous allions journellement faire une randonnée en
escaladant deux ou trois petits cols et à notre retour, les épouses présentes nous attendaient avec un bon repas, mais avant nous
avions droit à un excellent capuccino soigneusement garni d'une rasade de crême fraîche.
L'un d'entre nous dont je tairai le nom, décide un jour de faire une blague à Yvan LENAERS et de remplacer la crême fraîche
par une bonne couche de mousse à raser qui avait tout à fait le même aspect. Yvan, pas dupe, goûta l'infâme mousse du
bout de sa petite cuiller puis glissa son capuccino à Pol, son voisin de table qui, à notre grand désappointement, déglutit
avidement le breuvage sans manifester aucun signe de dégoût.
Les dindons, c'était nous ... quelle santé, le bougre.
Au delà de sa grande distraction et d'une petite pointe d'égocentrisme, Pol recèle de grandes qualités de discrétion
et une fameuse volonté. Il ne se plaint que très rarement, on entend très peu le son de sa voix. Parfois on perçoit un
léger gémissement comme dernièrement dans le Plattenberg qu'il venait d'aborder sur son 52. Ça, c'est le grand distrait.
Son insouciance est sûrement un gage de longévité car, involontairement, il ménage son système nerveux, source de bien
des maux.
Je lui souhaite encore de belles années sur son coursier et je fais appel à sa sagesse: si les sorties du mercredi te semblent trop
éreintantes, laisse les plus jeunes entre eux et n'oublie pas que le jeudi, il y a de très belles sorties. De plus, on va te faire une fleur
et on passera près de chez toi ... N'OUBLIE PAS, POL !
Le Président (Lucien Boulanger)
Juin '83 - Les Vosges.Pol frotte son vélo
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